Les tensions persistent… Retour sur une histoire assez compliquée !
La fièvre manifestante au Nicaragua s’est officiellement déclarée le 18 avril dernier avec l’annonce des réformes concernant les retraites qui impliquaient une augmentation des cotisations sociales de 5% et une réduction de 5% des pensions selon les recommandations du FMI. Suite à d’importants mouvements sociaux, le 22 avril, ce projet a été annulé. Cependant, des symptômes de rébellion ont précédé cet événement.
Les symptômes sociaux se concentrent dans un rejet populaire de plusieurs projets et/ou actions gouvernementales :
- Le rejet des projets d’extractions minières au nord du Nicaragua.
- L’invasion des colons (expropriations des locaux par les investisseurs)
- La déforestation dans les régions de forêt vierges (Bosawas, Côte Atlantique…)
- Le mégaprojet du Canal Interocéanique et ses projets collatéraux
- L’incendie de la Réserve de la biosphère Indio Maíz
Les premiers « symptômes » ont mobilisés les populations paysannes et indigènes dans des violents affrontements contre les « colons ». Le dernier « symptôme », l’incendie de la réserve Indio Maiz , les étudiants prennent le relais en s’indignant face à l’inaction du gouvernement pour protéger l’environnement.
Et là, presque dans la foulée, Ortega annonce cette fameuse réforme de retraites qui est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Les étudiants prennent la rue et manifestent pour « défendre les anciens ». Le Nicaragua étant le pays le plus pauvre d’Amérique Centrale, cette réduction est inacceptable. D’autant plus que l’inflation, due en partie à la crise du Venezuela (l’un des principaux fournisseurs du pays), n’a pas arrangé le peu de pouvoir d’achat qu’avait les Nicaraguayens. Les forces progouvernementales encadrent les manifestants, tirent et tuent une personne.
Ce premier mort a embrasé le pays.
Depuis ce jour, le peuple (paysans, indigènes, étudiants, commerçants, le patronat, les mouvements féministes … tout le monde sauf les services pubics par contrainte) manifeste et le gouvernement applique la répression. Car même si le projet de réforme à été abandonné, la population dénonce la tournure autoritaire du régime Ortega-Murillo et demande la justice, la démocratie, la libération des prisonniers politiques et la démission du président.
La répression se fait de manière sanglante. Les forces paramilitaires sont armées. Leur mission est d’écraser l’opposition et quiconque qui critique le régime sous le poids des armes et des représailles.
En effet, de nombreux manifestants ont perdu leurs emplois suite à leurs participations aux mouvements sociaux. Des médecins, des infirmiers et des brancardiers qui ont seulement voulu secourir des manifestants blessés ont été licenciés.
Entre le 18 avril et le 30 juin, on dénombre selon les sources entre 85 000 emplois perdus et 225 000. Bref, il y a une forte augmentation du chômage. Presque 300 entreprises ont interrompu leurs activités et environ 800 restaurants ont fermé leurs portes ainsi que 80% des petits hôtels.
Les manifestations ne se déroulent pas seulement sur Managua, la capitale mais aussi à Masaya (dite le bastion des insurgés), Granada, Léon, Jinotepe, Diriamba, Jinotega… l’Ambassade de France au Nicaragua est claire sur le sujet. Mieux vaut éviter de se rendre au Nicaragua actuellement sauf pour des raisons impératives. Plusieurs îlots de sécurité ont été mis en place par l’Ambassade dans la capitale (il y a 4 points de rassemblement) ainsi qu’à Léon, Granada et Bluefields.
A l’heure d’aujourd’hui, on compte plus de 300 mort, 2 000 blessés et 23 000 demandes d’asile au Costa Rica.
Est-ce qu’un dialogue entre le peuple et le gouvernement est encore possible ?
Ça a l’air plutôt compromis. L’Eglise catholique a, à plusieurs reprises, tenté de jouer les médiateurs mais en vain. Même les institutions internationales rencontrent un échec.
Ortega ne veut pas entendre que la seule solution pour apaiser les tensions dans le pays soit d’organiser des élections anticipées. En 2016, il fait modifier la Constitution pour pouvoir briguer un nouveau mandat. Donc, on peut supposer qu’envisager l’idée de démissionner ne lui vienne pas à l’esprit. Du coup, le gouvernement est fermé à tout type dialogue et ne fait que durcir la répression contre ses détracteurs.
En effet, en ayant fait adopté la loi « antiterroriste », le 16 juillet dernier, toute personne manifestant contre le régime Ortega-Murillo est dite « terroriste ». D’où l’étudiante belgo-nicaraguayenne, Amaya, s’est faite emprisonnée car elle était à la tête d’un mouvement étudiant dénonçant les répressions du régime.
Après l’assassinat de l’adolescent Matt Romero dimanche dernier lors de manifestations, la population affirme qu’elle continuera son combat en réclamant la justice dans son pays et un retour de la démocratie.
Voilà !
J’ai essayé de vous décrire la situation au Nicaragua du mieux que je peux. En sachant que j’ai cherché tous les points de vue pour les confronter et en ressortir des faits.
Quoiqu’il en soit, si vous avez pour projet de partir au Nicaragua, tenez-vous informé, soyez prudent et par sécurité, pensez à vous inscrire sur Ariane, il s’agit d’un service du Ministère des Affaires Etrangères. En vous y inscrivant, vous serez informé de la situation directement par SMS ou par mail et contacté en cas d’aggravation de la crise pour vous mettre en sécurité.
Je suis désolée, l’article est bien plus long que d’habitude mais je ne pouvais pas me permettre de parler d’un sujet si grave sans me documenter au maximum et remonter loin dans le temps.
J’espère tout de même que cet article vous plaira.
Pour plus d’informations, voici les sources consultées :
Les liens de l’Ambassade de France au Nicaragua :
France Diplomatie : Conseils aux voyageurs
Ambassade de France au Nicaragua : Carte de vigilance
Page Facebook : La Prensa Nicaragua -Journal d’actualité au Nicaragua.
Les articles de l’Express :
L’Express.fr : Nicaragua: la dérive dynastique et meurtrière d’Ortega – Publié le 14/06/2018 à 17:55
Les articles du Monde :
Les articles de RFI :
Le site qui suit a produit énormément d’articles sur le sujet et j’ai notamment consulté les articles suivants :
A l’encontre.org : Nicaragua. Examen de la situation au 8 août 2018 – Publié le 9 août 2018
A l’encontre.org : Nicaragua. L’insurrection pacifique du peuple – Publié le 2 juillet 2018
Autres sources :
France Culture.fr : Le canal de Nicaragua n’aura pas lieu – Publié le 25/09/2018
France Inter.fr : La révolution Sandiniste au Nicaragua – Publié le 17 septembre 2018
Information TV5monde.com : Nicaragua : comprenez la crise en 5 points – Publié le 24.07.2018 à 10:04
Merci d’avoir saisi ma perche !
Quelle tristesse, le pays était réputé pour être le plus stable d’Amérique Centrale, avec près de 20 ans de paix… Et là… Patatra… En plus de ça… Ça anihile mon projet de voyage pour février 2019 !
C’est ça, le pire. Le 13 mars dernier, l’Observatoire de Géostratégie de Lyon indiquait que le pays était stable malgré la pauvreté (fiche pays). Ceci dit, on ne sait jamais. Tant un événement peu survenir et arranger la situation tout comme un événement est survenu le 18 avril dernier et a foutu le bordel !
Si je comprends bien, le seul élément qui pourrait apaiser la situation, c’est que Ortega décide de lacher les renes ou à défaut… Amdettre qu’il ne sera pas un dictateur… C’est mal parti quoi
C’est vrai que c’est plutôt mal barré ! Et pour tout t’avouer, si je donnais mon avis sur la question, je taperai plutôt sur sa femme, Murillo qu’Ortega lui-même. A vrai dire, Murillo a réussi à obtenir le titre de vice-présidente du pays en 2017 et je n’ai pas eu l’impression que c’était vraiment démocratique. Le peuple ne l’apprécie pas vraiment. A moins que « sorcière » soit un mot doux, là-bas. Elle est autant responsable de la répression dans le pays qu’Ortega, d’autant plus que c’est elle qui gère la com’ ! Ceci n’est que mon point de vue, bien évidemment.